Scolarisation pour tous

Des ressources et conseils afin de mieux connaître et défendre ce droit, et les arguments juridiques contrant les mauvaises raisons invoquées pour refuser d’inscrire un enfant, un jeune à l’école publique.


Sommaire


Quelles sont les obligations et qui doit s’y soumettre ?

Conformément au Code de l’éducation et aux engagements internationaux de la France:

  • de six à seize ans, les enfants présents sur le territoire national sont soumis au respect de l’obligation d’instruction et d’assiduité scolaire (article L131-1 et suivants du code de l’éducation) ;
  • de trois ans à six ans, si sa famille en fait la demande, un enfant doit être accueilli à l’école maternelle le plus près de son domicile (article L113-1) ;
  • s deux ans révolus, un enfant peut être accueilli dans des conditions éducatives et pédagogiques adaptées et il fait bien sûr partie des effectifs (article L113-1).

Donc, l’obligation d’instruction s’imposent à tous, parents, enfants et Éducation nationale, de 6 à 16 ans et l’obligation de scolarisation s’impose à l’Éducation nationale dès 3 ans si la famille en fait la demande.

Et après 16 ans? Et bien le droit à l’éducation est aussi garanti:

  • Les élèves de plus de 16 ans ont le droit de poursuivre leur scolarité.
  • L’Éducation nationale est obligée de rescolariser un élève de plus de 16 ans qui a été exclu définitivement.
  • Un lycée ne peut refuser de réinscrire l’élève en raison de son comportement même sans conseil de discipline.
  • Un élève décrocheur scolaire de 17 ans a le droit de bénéficier d’une réinscription dans un parcours de formation.

Plus de détails sur le site de l’Étudiant, notamment:

Le droit à l’éducation est un principe fondamental garanti à chaque élève. Il est rappelé à l’article L. 111-1 du Code de l’éducation : “Le droit à l’éducation est garanti à chacun afin de lui permettre de développer sa personnalité, d’élever son niveau de formation initiale et continue, de s’insérer dans la vie sociale et professionnelle, d’exercer sa citoyenneté.” Selon l’article L. 111-2, l’enfant “a droit à une formation scolaire qui, complétant l’action de sa famille, concourt à son éducation”.

Tout élève, même âgé de plus de 16 ans, a donc le droit d’être scolarisé. L’article L. 122-2 du Code de l’éducation pose le principe que “tout mineur non émancipé dispose du droit de poursuivre sa scolarité au-delà de l’âge de 16 ans” et ajoute qu’à l’issue de la scolarité obligatoire, tout élève qui n’a pas atteint un niveau de formation reconnu doit pouvoir poursuivre ses études afin d’atteindre un tel niveau.


Et pour les familles itinérantes, sans domicile fixe ou sans papiers ?

Il en est ainsi pour tous les enfants de la commune : le droit commun s’applique en tous points aux enfants de familles itinérantes et de voyageurs, sans domicile fixe ou sans papiers ; ils ont droit à la scolarisation et à une scolarité dans les mêmes conditions que tous les élèves, quelles que soient la durée et les modalités du stationnement et de l’habitat, et dans le respect des mêmes règles :

  • la circulaire n° 2014-088 du 9-7-2014 (MENE1416234C) rappelle que :En application de l’article L. 111-1 du code de l’éducation, l’éducation est un droit pour tous les enfants résidant sur le territoire national, quels que soient leur nationalité, leur statut migratoire ou leur parcours antérieur. La Convention relative aux droits de l’enfant du 20 novembre 1989, ratifiée par la France, garantit à l’enfant le droit à l’éducation en dehors de toute distinction qui tienne à sa nationalité ou à sa situation personnelle.
  • l’article L 131-5 indique depuis le 29 janvier 2017 que: La domiciliation des parents à l’étranger ne peut être une cause de refus d’inscription d’un enfant soumis à l’obligation scolaire. Chaque enfant est inscrit soit dans la commune où ses parents ont une résidence, soit dans celle du domicile de la personne qui en a la garde, soit dans celle où est situé un établissement ou une section d’établissement destinés plus particulièrement aux enfants de Français établis hors de France. Le statut ou le mode d’habitat des familles installées sur le territoire de la commune ne peut être une cause de refus d’inscription d’un enfant soumis à l’obligation scolaire. Lorsque la famille n’a pas de domicile stable, l’inscription dans un établissement public ou privé peut être cumulée avec l’inscription auprès du service public du numérique éducatif et de l’enseignement à distance prévu à l’article L. 131-2.La conclusion d’un contrat de travail à caractère saisonnier ouvre le droit de faire inscrire ses enfants dans une école de la commune de son lieu de résidence temporaire ou de travail.

Le fait qu’une famille soit hébergée de manière provisoire sur le territoire d’une commune est sans incidence sur le droit à la scolarisation. Dans le cas où l’adresse postale (de domiciliation) est différente du lieu de résidence, c’est la résidence sur le territoire d’une commune qui détermine l’établissement scolaire d’accueil.

La scolarisation s’effectue dans les écoles et les établissements du secteur du lieu de stationnement ou de résidence, sauf cas particulier impliquant l’accueil dans une unité pédagogique dont l’école ou l’établissement est dépourvu. En effet, l’aire d’accueil n’étant pas une adresse postale, la domiciliation est possible auprès d’un Centre communal ou intercommunal d’action sociale (CCAS ou CIAS) ou encore d’un organisme agréé. Il est donc important de demander au responsable légal l’adresse administrative (de domiciliation) qui ne correspond pas toujours à l’adresse de résidence.

Dans sa décision n° 2018-011, le Défenseur des droits cite un rappel à la loi de la préfecture à l’attention d’une mairie :

59. Dans le cadre de ces nouvelles instructions, il a été communiqué au Défenseur des droits un courrier du 1er août 2017 aux termes duquel la sous-préfète de S a procédé à un rappel à la loi à l’attention de la maire de Y en ces termes : « Le fait que la famille vive provisoirement sur le territoire d’une commune est sans incidence. Par ailleurs, pour l’école primaire, selon les dispositions de la circulaire n° 2014-088 du 9 juillet 2014, même si la famille ne peut pas lors de la demande d’inscription à l’école présenter un ou plusieurs des documents nécessaires, l’enfant doit bénéficier d’un accueil provisoire ».


Comment se passe l’inscription à l’école ?

L’enjeu est de garantir une scolarisation immédiate, pour tous les enfants, quelle que soit la diversité des situations et des types de mobilité des familles.

Dans le premier degré, l’inscription scolaire est de la compétence du maire qui agit en la matière en tant qu’agent de l’État. Le directeur d’école procède à une admission des enfants même si la famille se trouve dans l’impossibilité de présenter les documents préalables à l’admission (certificat d’inscription, carnet de vaccination) :

  • la circulaire n°2006-137 du 25-8-2006 indique que l’admission d’un enfant dans une école ou un établissement scolaire ne peut être subordonnée à la présentation d’une attestation d’assurance ;
  • la circulaire n° 2014-088 du 9-7-2014 (MENE1416234C) rappelle que :Le directeur d’école prononce l’admission sur présentation :
    • du certificat d’inscription délivré par le maire de la commune dont dépend l’école. Ce dernier document indique, lorsque la commune dispose de plusieurs écoles, celle que l’enfant fréquentera ;
    • d’un document attestant que l’enfant a subi les vaccinations obligatoires pour son âge ou justifie d’une contre-indication en application des dispositions des articles L. 3111-2 et L. 3111-3 du code de la santé publique (certificat du médecin ou photocopie des pages du carnet de santé relatives aux vaccinations, carnet international de vaccinations).

    Faute de la présentation de l’un ou de plusieurs de ces documents, le directeur d’école procède pour les enfants soumis à l’obligation scolaire conformément à l’article article L. 131-1-1 du code de l’éducation à une admission provisoire de l’enfant.Il convient de rappeler que les personnels de l’éducation nationale n’ont pas compétence pour contrôler la régularité de la situation des élèves étrangers et de leurs parents au regard des règles régissant leur entrée et leur séjour en France. La circulaire n° 2012-141 du 2 octobre 2012relative à l’organisation de la scolarité des élèves allophones nouvellement arrivés donne toutes précisions utiles pour l’organisation de la scolarité de ces élèves.

  • La circulaire interministérielle du 25 janvier 2016 (JUSF1602101C) ajoute que: Pour les élèves relevant d’une scolarisation dans le premier degré, l’inscription dans l’une des écoles maternelles ou élémentaires de la commune où ils résident relève de la compétence du maire, conformément aux dispositions de l’article L. 131-5 du code de l’éducation. Ainsi, les enfants sont normalement scolarisés dans une école proche de leur résidence même si celle-ci a un caractère provisoire. En cas de refus de scolarisation par le maire, le préfet doit procéder lui-même à cette inscription en application de l’article 2122-34 du code général des collectivités territoriales. Cette mention concernant le rôle du préfet sera ajoutée à l’article L 131-5 du code de l’éducation à partir du 1 mars 2019 (loi n°2018-778 du 10 septembre 2018 – art. 61) sous la forme suivante :En cas de refus d’inscription de la part du maire, le directeur académique des services de l’éducation nationale peut autoriser l’accueil provisoire de l’élève et solliciter l’intervention du préfet qui, conformément à l’article L. 2122-34 du code général des collectivités territoriales, est habilité à procéder à une inscription définitive.

Dans le second degré, l’affectation relève des services de la direction des services départementaux de l’éducation nationale (DSDEN) du département de résidence. L’inscription est du ressort de l’établissement scolaire d’affectation. Toutes les situations d’obstacle à la scolarisation devront être signalées immédiatement à l’IA-DASEN, sous couvert de l’IEN de la circonscription.


Et en cas de manque de places ou d’infrastructures insuffisantes ?

Dans le cas où le directeur d’école ne disposerait pas d’une capacité d’accueil suffisante pour admettre l’élève, il établit immédiatement, par la voie hiérarchique, un rapport détaillé qu’il adresse à l’IA-DASEN, lequel, agissant par délégation du recteur, en informe le préfet et prend toutes les dispositions pour rendre cet accueil possible.

Le manque de place n’a été jugé recevable comme argument par le tribunal administratif que pour les moins de trois ans. Ainsi dans sa décision n° 2018-011, le Défenseur des droits cite le tribunal administratif de Versailles :

57. En janvier 2018, le tribunal administratif de Versailles a été saisi de deux demandes d’annulation de décisions implicites de refus de scolarisation de deux enfants par la maire de Y. Ces demandes s’inscrivaient dans le cadre de l’installation de familles d’origine syrienne dans des pavillons abandonnés de la commune. En défense, la maire de Y évoquait un manque de places et de temps pour s’organiser, les enfants ne parlant pas le français. Dans deux jugements du 15 mars 2018, le juge administratif a annulé les deux décisions implicites de refus de scolarisation et a enjoint la maire à scolariser les enfants concernés. Il a considéré, dans le cas de l’enfant à scolariser en classe maternelle, que la maire ne justifiait pas de l’insuffisance de places disponibles ; et, dans le cas de l’enfant à scolariser en niveau élémentaire, qu’elle ne pouvait légalement opposer les insuffisances des infrastructures d’accueil. Il a ajouté qu’elle ne pouvait légalement opposer les difficultés d’adaptation des enfants ne parlant pas français.


Un conseil important pour faire valoir ses droits

Sur le site du Gisti (Groupe d’information et de soutien des immigré·e·s), on peut trouver une fiche pratique du Défenseur des droits datant de janvier 2017 qui donne un conseil précieux pour défendre ses droits :

Il est indispensable que, préalablement à la saisine du Défenseur des droits ou de façon concomitante, les associations ou les familles fassent des démarches officielles auprès des autorités compétentes afin d’apporter la « preuve » matérielle d’un refus d’accès aux droits, et ce notamment en cas de refus d’inscription scolaire en mairie. On peut distinguer deux hypothèses :

  • si la famille s’est vue opposer un refus de guichet, les dossiers des enfants à inscrire en mairie doivent alors être adressés à la mairie par courrier en recommandé avec accusé de réception (l’accusé de réception permet de faire courir un délai de deux mois au terme duquel naît une décision implicite de rejet, le cas échéant, qu’il est possible de contester dans le cadre d’un recours devant la juridiction administrative) ;
  • si les dossiers ont été déposés au guichet mais qu’aucune décision d’affectation des enfants dans une école n’est apportée au guichet le jour même, il est nécessaire d’obtenir un récépissé de dépôt de demande d’inscription afin de faire débuter le délai de deux mois à l’échéance duquel une décision implicite de rejet sera constituée.

Le Défenseur des droits rappelle l’importance d’obtenir une trace écrite du dépôt de dossier dans la mesure où il fait courir des délais gracieux et contentieux permettant par la suite d’entamer des procédures devant le tribunal administratif, par exemple.


Quelques références pour en savoir plus

  1. Le code de l’éducation : articles L 111-1L 113-1L 131-1L 131-1-1L 131-2L 131-5
  2. Loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’École de la République
  3. Circulaire interministérielle du 25 janvier 2016 (JUSF1602101C) relative à la mobilisation des services de l’Etat auprès des conseils départementaux concernant les mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille et les personnes se présentant comme tels
  4. Circulaire n° 2014-088 du 09-07-2014 : Règlement type des écoles maternelles et élémentaires publiques
  5. Circulaire n° 2012-141 du 2 octobre 2012 : Organisation de la scolarité des élèves allophones nouvellement arrivés
  6. Circulaire n° 2012-142 du 02-10-12 : Scolarisation et scolarité des EFIV
  7. Circulaire n° 2006-137 du 25-8-2006 : Rôle et place des parents à l’école
  8. sur EduScol, dans la page concernant les enfants de familles itinérantes et de voyageurs (EFIV)
  9. Décision 2018-011 du Défenseur des droits du 30 mars 2018 relative à un refus de scolarisation opposé par une mairie pour une famille hébergée par une association
  10. L’accès à la scolarisation cadre légal, dysfonctionnements et moyens d’action de la Ligue des droits de l’Homme, septembre 2018
  11. Rapport 2016 consacré aux droits de l’enfant. droit fondamental à l’éducation : une école pour tous, un droit pour chacun, Défenseur des droits